Notre consultant associé Julien COLOMBATTO a signé une tribune libre dans le magasine Le Revenu. Voici son article “Tout savoir avant d’investir dans la forêt”.
La surface forestière couvre 30% du territoire de la planète ! La France est légèrement au-dessus de la moyenne avec 31% de son territoire métropolitain recouvert de forêt.
En constante progression, la forêt française, grâce à différentes politiques de reboisement et d’encouragement à pratiquer une gestion sylvicole d’avenir, a vu sa superficie passer de 9,5 millions d’hectares en 1830 à 17 millions d’hectares en 2015.
1 – Pourquoi investir dans une forêt ?
C’es un investissement socialement responsable : gérer une forêt de façon durable permet la préservation de la biodiversité.
- Un investissement socialement responsable : gérer une forêt de façon durable permet la préservation de la biodiversité. En France, elle compte cent espèces d’arbres différentes, soixante-treize espèces de mammifères, cent vingt espèces d’oiseaux.
Elle est également un puits de carbone (qui capte 15% des émissions annuelles de CO² du pays) et elle a un rôle de régulation hydraulique et d’épuration de l’eau.
- Un investissement tangible et rentable : les arbres ont une croissance régulière qui continue en dépit des séismes financiers. Le bois peut être coupé et vendu au moment le plus favorable et autorise un cycle attentiste, comme un investisseur boursier ferait le dos rond le temps de traverser la tempête.
La forêt offre ensuite un rendement intermédiaire de l’ordre de 2% par an que l’or n’offrira pas par exemple.
- Enfin, la forêt bénéficie d’une fiscalité privilégiée : abattement de 75% sur l’assiette taxable à l’IFI, de 75% sur l’assiette des droits de succession, quasi-neutralité fiscale des revenus de coupe de bois et très faible taxe foncière.
2 – Quel budget pour acheter une forêt, pour quel but ?
Le prix de l’hectare moyen était de 4.190 euros en 2019.
Il peut cependant passer du simple au triple, selon l’essence dominante de la parcelle, la fertilité du sol, son emplacement, sa facilité d’exploitation, la densité de gibier présent, le «cubage» (volume de bois sur pied), le risque d’exposition à une maladie, la proximité des industries de transformation… le prix moyen maximal/ha des plus belles forêts est ainsi passé de 6.000 euros à plus de 12.000 euros de 1997 à 2019, soit une hausse de 111%.
Si investir dans une forêt est un choix pertinent pour vous, l’acquisition d’un massif «conséquent» (à partir de 25 ha) sera un impératif, pour gérer la forêt de façon durable via un «plan simple de gestion» (PSG) qui vous donnera accès à la fiscalité avantageuse. Comptez un budget d’environ 250.000 euros pour une belle forêt de production de 25 hectares.
Si vous souhaitez investir dans une forêt pour une activité de loisir, une forêt proche de votre domicile vous satisfera au mieux, pour « sauter dans vos baskets » dès que le temps s’y prête. La surface et le budget pourront être bien moindres, de l’ordre de 5.000 euros pour 3 hectares par exemple, le volume de bois important moins.
Avant de vous lancer dans la recherche de la forêt idoine, il faut donc rapporter votre budget au prix de l’hectare.
3 – Où acheter une forêt et avec quel peuplement ?
Si certains départements sont très boisés et recouverts par la moitié de forêts voire plus, d’autres en sont très peu pourvus. Il sera plus aisé de trouver une forêt en Gironde, en Corrèze ou dans le Jura par exemple, plutôt qu’en Bretagne ou en Normandie.
Taillis, futaie, résineux, jeune plantation…les essences présentes et leur stade de développement sont à prendre en compte pour répondre à votre objectif. Si la forêt est pour vous un investissement «financier», un peuplement mûr vous assurera une rentabilité immédiate alors que de jeunes plants viseront une capitalisation à long terme.
Le potentiel de revente à bon prix du bois sur pied sera indexé sur la demande en dit-bois. Ainsi, à ce jour, la demande en douglas est telle, du fait de la reprise du marché américain notamment, que le prix du mètre cube monte en flèche (jusqu’à 100 euros/m3), alors que le prix de l’épicéa a chuté du fait du risque sanitaire lié à la sécheresse et aux scolytes (insectes xylophages).
En matière d’investissement forestier, rien n’est jamais acquis ! Les vérités d’aujourd’hui ne sont pas forcément celles de demain.
4 – A qui acheter une forêt ?
Cette question revient à savoir qui en est propriétaire ! Contrairement à ce qu’on pourrait penser, 75% de la forêt française est privée. Le reste est public, 16% appartenant à des collectivités et 9% à l’État (domaniales).
Une piste à privilégier est donc de vous tourner vers des propriétaires privés pour vous la procurer ! Pour autant, identifier le propriétaire «vendeur» est une autre paire de manches et il ne suffit pas d’éplucher les petites annonces comme on peut le faire pour de l’immobilier «classique». Le marché étant des plus confidentiels et les biens rares, se tourner vers un spécialiste de ce type de transactions pour avoir accès aux offres est une quasi-nécessité.
Un bien forestier peut par exemple «changer de mains» une fois tous les 100 ans… En 2019, seulement soixante-dix forêts de plus de 200 hectares et 160 de 50-100 hectares se sont vendues en France.
5 – Quelles précautions prendre pour investir dans une forêt ?
Vous pouvez parfois être empêché de racheter la parcelle ciblée en raison du droit de préférence des propriétaires voisins (lots boisés <4 ha) ou par un droit de préemption de la commune ou de l’Etat.
La forêt ciblée peut aussi faire l’objet de certains engagements de gestion ou être contrainte par des critères environnementaux ou urbanistiques : espace naturel sensible, parc naturel, Natura 2000, plan simple de gestion… Il faut bien vérifier ce à quoi obligent ces réglementations et s’y conformer scrupuleusement le cas échéant.
Il convient aussi de prévoir un budget pour l’entretien de votre forêt après l’achat. Dépressage, débroussaillage, éclaircies, replants, sont autant de travaux nécessaires qui viendront impacter votre budget et l’intervention d’un gestionnaire forestier est fortement recommandée. Tout compris, vous pouvez budgéter environ 120 euros par hectare et par an, hors coût de replantation qui pourra être en partie subventionné.
La pratique de la chasse sur votre future parcelle est également un point à aborder. Même propriétaire, depuis la loi Verdeille (1964), vous ne pourrez pas nécessairement vous réserver le droit de chasse ou vous opposer à sa pratique sur votre propriété. Il est bon à savoir aussi que la location de la chasse est un revenu conséquent dans l’investissement forestier !
Le prix : plusieurs méthodes de calcul rentrent en compte. Valeur des bois, valeur du sol, valeur de consommation… une approche multicritères permettra une évaluation au plus juste de la propriété, et son achat au juste prix.
Aucun comparatif avec une parcelle voisine n’étant disponible, un conseil pourra vous aider dans cette démarche délicate.